Poutine, l'opposant et le poison
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Après l’invasion de la Crimée en 2014 et son appui au séparatisme pro-russe en Ukraine, la Russie est à nouveau dans le viseur des Occidentaux qui la soupçonnent d’être derrière l’empoisonnement d’Alexeï Navalny, le principal opposant à Vladimir Poutine, exfiltré à Berlin et toujours dans le coma à l’hôpital de la Charité, après un malaise le 20 août, dans un avion qui le ramenait de Sibérie.
Mercredi la chancelière allemande Angela Merkel a ainsi pressé Moscou de s’expliquer après la publication d’analyses en Allemagne montrant que l’avocat russe, auteur sur les réseaux sociaux de nombreuses publications dénonçant la corruption des élites russes, avait été empoisonné par un agent neurotoxique "de type Novitchok". Elle a également demandé à ce que les responsables "soient traduits en justice" pour répondre de leurs actes. À la suite de ces déclarations d’une rare fermeté pour une chancelière aux prises à des positions d’ordinaire mesurées, l'Union européenne, l'Otan, Paris et Londres ont mis la pression sur Moscou. L'Otan a notamment pressé vendredi, au lendemain des menaces de nouvelles sanctions de l'UE, Moscou de tout révéler de son programme Novitchok, ce poison à l'histoire sulfureuse. Mais face aux "preuves sans équivoque" que met en avant le gouvernement allemand, Moscou oppose son "scepticisme", nie toute implication et demande des preuves à l’Allemagne.
Mais qu'est-ce que le Novitchok ? Il s'agit d'un groupe d'agents neurotoxiques particulièrement dangereux, ajouté à la liste des substances illicites de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques en novembre 2019. Mis au point par les Soviétiques dans les années 1970 pour contourner le traité sur les armes chimiques, son existence n'a été révélée qu'au début des années 1990 par un chimiste russe qui vit aujourd'hui aux États-Unis. La Russie est censée achever, sans aide extérieure, la destruction totale de tout son arsenal d'ici à décembre 2020. Mais plusieurs personnalités russes ont été victimes d’empoisonnements, avérés ou suspectés, dans un passé récent à cette arme chimique qui s'attaque au système nerveux. C’est notamment le cas de l’ex-agent double russe Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia en 2018 en Angleterre.
La Première ministre britannique Theresa May avait alors accusé le renseignement militaire russe (GRU) d'être à l'origine de l'empoisonnement. Par la suite une traque sans précédent avait été lancée par les services de contre-espionnage britannique, français, suisse et leurs partenaires, notamment américains. Elle avait permis de montrer que quinze officiers du GRU avaient transité et résidé en France entre 2014 et 2018.
Plus récemment un officier français a été mis en examen pour trahison au bénéfice de la Russie, et serait soupçonné d’avoir fourni des documents ultra-sensibles aux services secrets russes. L’homme aurait été arrêté par les services de contre-espionnage, la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI). Il a été placé en détention provisoire à la prison de la Santé à Paris.
Alors qu’est-ce que le "GRU", le service de renseignement russe qui affole l’Europe ? Sommes-nous entrés dans une nouvelle "Guerre Froide" ? Enfin que se passe-t-il en Biélorussie ?
Invités :
- Frédéric Encel, docteur en géopolitique, maître de conférences à Sciences Po Paris et à la Paris School of Business et auteur de "Les 100 mots de la guerre".
- Tatiana Kastouéva-Jean, chercheuse, directrice du Centre Russie à l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI), auteure de "100 questions sur la Russie de Poutine".
- Galia Ackerman, journaliste, spécialiste du monde russe et ex-soviétique, auteure de "Le régiment immortel : la guerre sacrée de Poutine".
- Jean-Dominique Merchet , journaliste à L’Opinion, spécialiste des questions de défense et diplomatie.
Présenté par : Caroline Roux, Axel de Tarlé