Afrin ou le temps des crues

Au Bangladesh, les crues du fleuve Brahmapoutre, devenues incontrôlables, jettent de plus en plus de villageois sur les routes. Sur les îles de limon de son cours inférieur, où vivent les populations les plus déshéritées du globe, Afrin, une orpheline de 12 ans, dont le père a fui à Dacca, fait face à la montée des eaux, entre sauvetage d’un chevreau et bricolage de digues. Face à la submersion de son monde, la jeune fille se résout à embarquer sur un radeau ballotté par les flots pour rejoindre à son tour la capitale. Livrée à elle-même dans cette métropole surpeuplée et polluée, elle découvre la misère en même temps que la solidarité des enfants des rues. Avec un groupe de trois garçons, elle sillonne les artères de la ville pour collecter ou brûler des déchets en échange de quelques taka, la monnaie locale. L’âpreté de son quotidien n’empêche pas Afrin de continuer à rire et à rêver… Lueurs d’espoir Accrochée à sa jeune héroïne en lutte pour sa survie, la caméra plonge dans l’eau et la vase, capture sa rencontre avec un vieil homme condamné à subir les fureurs du fleuve et marche avec elle jusqu’à Dacca, où la tendresse de liens fraternels inattendus panse un peu la cruauté de l’indigence. Au fil de plans sublimes de nature sauvage et d’agitation urbaine, ce portrait poétique d’une enfant contrainte de grandir trop vite, tourné sur cinq années et découpé en chapitres, met en lumière les conséquences concrètes du dérèglement climatique sur les plus pauvres. Alors que la fréquence des inondations est en hausse, les Nations unies évaluent à environ 30 millions le nombre de déplacés bangladais au cours de la prochaine décennie.