Enceinte sans le savoir : le déni de grossesse
La maison des Maternelles- 2 min 16 s
- extrait
- tous publics
Du même programme
- La maison des Maternelles sponsorisé La maison des Maternelles Dans ma peau - Episode 2 avec Marie publié le 14/10 | 25 min
- La maison des Maternelles La maison des Maternelles La maison des Maternelles à votre service diffusé le 14/10 | 33 min
- La maison des Maternelles La maison des Maternelles Émission du lundi 14 octobre 2024 diffusé le 14/10 | 22 min
- La maison des Maternelles La maison des Maternelles La maison des Maternelles à votre service diffusé le 11/10 | 33 min
C’est quoi un déni de grossesse ?
Le déni de grossesse désigne le fait d’être enceinte sans avoir conscience de l’être. Le corps ne présente aucun des signes habituels de la grossesse. En l'absence de ces signes, la femme, mais aussi son entourage, ignorent la grossesse. Les spécialistes appellent cette situation « la contagion » du déni de grossesse.
On distingue 2 types de dénis de grossesse :
- Le déni de grossesse partiel : la grossesse est découverte après le premier trimestre de grossesse mais avant le terme. Il arrive que le corps de la femme se transforme dans les quelques heures qui suivent son annonce.
- Le déni de grossesse total : la grossesse n’est découverte qu’au moment de l’accouchement.
Pauline Minjollet, docteur en psychologie, spécialisée en périnatalité et exerçant à la maternité Antoine Béclère de Clamart, nous en dit plus :
« Le déni de grossesse concerne toutes les femmes, quel que soit le milieu ou l’âge. Il ne concerne pas seulement les jeunes filles. Une femme ayant déjà eu des enfants peut très bien faire un déni de grossesse pour le troisième ou quatrième enfant. »
Une grossesse invisible
Le déni de grossesse est un mécanisme très particulier du corps. Être enceinte sans pour autant avoir les symptômes de grossesse peut paraître difficile à croire. Le docteur Pauline Minjollet nous explique pourquoi ces signes ne sont pas perçus par la maman ou par l’entourage :
« C’est un mécanisme psycho-corporel très fort et inconscient. Il agit comme un mécanisme de défense. Et lorsque certains signes pointent leur nez comme les maux de ventre ou nausées, les femmes imaginent que cela est dû à une constipation ou à une indigestion. C’est une dissimulation. Elles n’ont pas conscience de leur état, rien ne leur permet de repérer les signes de grossesse. Leur corps ne montre aucun symptôme. Elles sont vraiment dans l’ignorance qu’elles attendent un enfant. »
Les facteurs pour l'expliquer
Toutes les femmes peuvent être concernées. Cependant, il existe plusieurs facteurs qui augmentent le risque de faire un déni de grossesse :
- Une stérilité supposée
- Un contexte familial difficile (abus sexuel ou psychologique)
- Des grossesses rapprochées
- Une grossesse résultant d’une agression sexuelle
Quelques chiffres sur ce phénomène
Dans cette même étude de l’Association pour la santé de l’enfant dans son parcours de vie (AFPSSU), le pédopsychiatre Michel Libert indique :
« La diversité des dénis de grossesse relève d’une pluralité de mécanismes psychopathologiques. L’écoute et l’accompagnement semblent fondamentaux pour que puisse se résoudre l’impact de cette grossesse et que s’installe une relation satisfaisante entre la mère et l’enfant. »
La révélation de la grossesse
Le déni de grossesse est levé lorsque l’idée même de porter un enfant est soulevée. Il faut qu’une tierce personne émette l’idée. Il faut qu’elle soit verbalisée. Si ce n’est pas le cas, le déni persiste et peut perdurer jusqu’à l’accouchement. Pauline Minjollet nous éclaire sur ce processus :
« Ce qu’il y a d’étonnant, c’est qu’une fois que ces femmes prennent conscience de leur grossesse, en quelques heures, le ventre peut se développer. C’est la levée du déni qui fait que quelque chose se débloque psychologiquement et physiquement. Ensuite, le fœtus prend sa place en avant. J’ai rencontré une femme qui a découvert sa grossesse aux urgences et qui, une fois le déni levé, ne pouvait plus agrafer son pantalon. Le changement morphologique est très rapide et très impressionnant. »
La découverte de son état de grossesse est un véritable choc pour la future maman. L’annonce peut être très difficile à vivre, comme le rappelle l’experte :
« Les femmes concernées vivent l’annonce, parfois, comme un cauchemar et peuvent perdre pied. Elles traversent une phase de choc. Ce qui est dur à accepter pour elles, c’est la perte de contrôle de leur corps. L’impression que leur corps les a trahies. Parfois après l’annonce, la grossesse reprend son cours normalement mais ces femmes ont besoin d’un suivi psychologique jusqu’au terme. Il ne faut pas banaliser le déni de grossesse car ce n’est pas un phénomène ordinaire. »
Le sentiment de culpabilité peut être particulièrement difficile à supporter pour les femmes qui font un déni de grossesse. Elles se sentent coupables de n’avoir pas repéré qu’elles étaient enceintes, comme témoigne Pauline Minjollet :
« Elles culpabilisent ! Elles peuvent interpréter le déni comme le signe qu’elles ne sont pas de bonnes mères, qu’elles n’ont pas d’instinct maternel. Elles ont l’impression, en ignorant la présence de ce fœtus, qu’elles l’ont abandonné. Elles ne se sont pas senties actrices de leur grossesse. Et elles peuvent aussi avoir honte d’avoir vécu sans pouvoir tenir compte de leur grossesse d’avoir fait des abus (comme d’avoir consommé de l’alcool ou du tabac…). »
Prise en charge et conséquences du déni de grossesse
L’annonce de la grossesse lors de l’accouchement est un véritable électrochoc. La plupart des femmes concernées peuvent bénéficier d’une prise en charge particulière comme nous le confirme Pauline Minjollet :
« À l’hôpital dans lequel je travaille, on leur propose un séjour prolongé où l’on passe de 3 à 5 jours. Cela leur permet de rencontrer l’enfant de parler des modalités pour la suite. On a constaté que beaucoup d’accouchements sous X sont issus de déni ! »
Dans une étude menée pendant 7 ans dans les maternités de Denain et Valenciennes, on a recensé 56 cas de déni de grossesse.
Selon cette étude, pour la moitié des cas au moins, il n’y a pas de gestes destructeurs vis-à-vis de l’enfant. On note souvent dans le parcours de ces femmes une relation oedipienne (fille-père) complexe, des relations perturbées avec la mère, des deuils récents. Cependant, tous les milieux sociaux sont concernés, et il est impossible de définir un profil psychologique type pour les femmes qui vivent un déni de grossesse.